La peau est une invention ingénieuse mais superficielle.
La rapidité avec laquelle elle se répare est merveilleuse.
Tous les accrocs qu'on y fait, et il y en a sans cesse — menues coupures, égratignures — se recousent d'eux-mêmes, aussitôt, comme par magie.
Dans cette hâte se perçoit la sourde volonté de dissimuler les dessous, qui se doivent de rester secrets. La peau ne souffre aucun défaut.
Sur la plage ultra-sensible de la peau vient s'écrire l'infinie variété des émotions. Certaines d'entre elles ont l'aspect d'un nuage de sang, retenu dans les profondeurs de la chair et qui remonte d'un coup à la surface du visage pour l'empourprer. Écrire est beaucoup dire car ce livre qui n'a qu'une seule page, rose et continue, demeure toujours vierge : les mots ne s'y inscrivent que pour s'effacer peu après.
On ne pouvait trouver mieux que le mot pellicule pour désigner le film photographique : c'est une petite peau, en effet, qui révèle aussitôt, sans rien cacher, ce qui l'a impressionnée.
_ Gérard Farasse, Belles de Cadix et d'ailleurs
[Éléments d'anatomie]
Pellicule # 01│05 - série photographique " femelles en châsse " │juin 2020