est-ce que la joie se transplante du corps
et si du souvenir elle s'enracine, aussi ?
avec les années regarder cette joie
intacte partie du fond d'ailleurs
respirée en toi en elle en lui
un jardin sans ligature
samedi 31 août 2024
La main sur une feuille humide
vendredi 30 août 2024
Elle n'inspire pas l'amour
et le monde se confond dans les yeux qui se lèvent
prendre l'origine sang par la pudeur
prendre une ombre à bras-le-corps
les contradictions s'étreignent
théorème de l'aube N°42 |
elle replie la main pour sentir
le souvenir de la brûlure
la coupure du souvenir
jamais lit de fusion
il n'est pas une heure où la différence s'amenuise
dans l'écoulement du plaisir
samedi 24 août 2024
IRM : ce que l'évidence ne sait pas
Corollaire. Peu de monde a une âme.
_ Pascal Quignard, Vie secrète
[Chapitre VIII Le secret]
Ed.Gallimard
le corsage - Roubaix VIII 2024 |
peut-être l'abandon l'intuition précédée d'une déroute peut-être le dessin du corps nu sur la table quelque chose comme un grand bruit d'existence le signal du rêve pénétrant les tissus une liste de mots à franchir affranchie du langage un espace alimenté de tout son-suspens-sidéral peut-être la morsure dans l'écriture une vie dos contre dos une musique immobile dans le champ magnétique
mercredi 21 août 2024
La culbute
irrévocable |
devant la nuit et l'origine impossible
l'air sur moi est un souffle humide
qui s'offre enflammé à ma mémoire
je touche le ciel par sa grammaire
la brise mord doucement ma bouche
les éclairs du verbe glissent dans la voix
attention au nom qui voudrait la percer
— je ne suis pas la vapeur diffuse
— je ne suis pas la douceur entière
entre mes doigts un dialogue palpite
brune en perte de vitesse
dans ce calme bruyant
je désobéis au monde
vendredi 16 août 2024
N'explique pas le pourquoi, jamais !
autoportrait |sans titre| |
Une littérature arrêtée. Je sais que j'utilise cette expression de « littérature arrêtée » pour désigner aussi bien le journal intime que la photo. Dans l'autoportrait photographique, je dirai que ce sous-entendu « littérature-arrêt » se retrouve avec un exposant fort : l'arrêt est littéraire, bien sûr, mais il est comme montré du doigt alors qu'il est, sous nos yeux, en train d'avoir lieu. De toute façon, quoiqu'on aborde, c'est une affaire de redoublement qu'on associe.
Lié, donc.
Gathered.
Plan serré. La hantise du défait du visage, de la désunion de l'aspect général du soi.
_ Denis Roche, La disparition des lucioles
(réflexions sur l'acte photographique)
Seuil/Fiction & Cie - p.101
jeudi 15 août 2024
mercredi 14 août 2024
S'écrire pour te rencontrer │Autobiogriffures
sans titre [Sunday] 2019 |
un simple fait par le regard et les pas.
Au jeu des re-trouvailles presque simultanées, enveloppé dans un pliage de papier brun, tombe du bord de la bibliothèque, le livre de Sarah Kofman "Autobiogriffures - Du chat Murr d'Hoffmann"
Voici les premières lignes du chapitre Une écriture de chat :
Et si un chat se mêlait d'écrire, aspirait à être, non un griffonneur ou un griffonnier, mais un véritable écrivain ? Nul ne pourrait le lire ? Mais voudrait-on le lire ? Les signes de son écriture, illisibles, ne seraient pas considérés comme des hiéroglyphes, traduisibles, éventuellement, par un lecteur averti qui en détiendrait le code ; ils ne seraient pas tenus pour des signes, fussent-ils incompréhensibles, mais dédaignés, telles de simples tâches d'encre dépourvues de sens (si ce n'est celui, comme dans les tests de Rorschach, projeté par le lecteur). Une écriture de chat, prise à la lettre, n'est pas seulement indéchiffrable, elle n'a pas à être déchiffrée : elle n'est pas écriture. Un chat ne saurait «écrire comme un chat» : il ne saurait écrire : écriture, propre de l'homme.
mardi 13 août 2024
Avec toi j'ai pris le mur
Elle croît et se précipite
Elle dévore les mondes.
_ Safaa Fathy
[Le premier et le dernier - 1986]
in Où ne pas naître
immensité-6733 |
autoportrait-6740 |
l'enchantement qui suit ma question est aussi grand que toi
la lumière qui s'accroche à mon visage a con-sidéré le ciel
les filaments des mots se sont jetés sur les parois du vide
de là — une envie verbale s'est nouée à l'azur-entrevue
j'ai entendu la chaleur du vertige chercher une toile
une tapisserie de sens dans l'immensité du souffle
passage-6746 |
avec l'oeil l'oreille la main — saisissant
comment partir du fond du jour
pour gravir ton corps ?
— Ostende Belgique, texte et photos
12 août 2024
vendredi 9 août 2024
jeudi 8 août 2024
Le faux départ | alba capitule
alba capitule |
marcher
le pas long
la soif gutturale
marcher d'instinct
clarté des fleurs bleues
émoi d'émoi et la vérité
vive d'un jour à l'autre
la fête sur ton sentier
la nuit est sa fonte
où je cours, ouile sang chaud
les jambes vignes
peut-être sourdes
la salive fauchée
et s'arrêter à ton seuil
le rythme insensible
que s'est-il passé ?
le temps est parti
la fleur est éclose
en pleine lumière
le parfum à l'oeil
voir soudainement
le dos des lettres
écrire sur l'échine
la voie entre les lèvres
invisible état du soleil
et soulever la marche
c'est être avec toi
ce que je sens
je repars de là
mardi 6 août 2024
Illustration entrelacée : ma transparence est presque chair
est le sommet de la spiritualité,
pour l'homme spirituel, elle est presque chair.
ma transparence VI. le cahier affranchi |
Ainsi en poésie, l'image préexiste à l'idée que l'on y sertira. Il arrive qu'elle poursuive un poète des années durant : domestique et fabuleuse, familière et inquiétante. Il s'agit presque toujours d'une image issue de la prime enfance : le nom étrange d'un arbre, l'insistance d'un geste. Elle attend avec patience que la révélation la comble. Chez Proust, ce mystère de l'image inondée tout à coup par des torrents de sens et qui ensuite revient sans cesse, comme si elle était vue depuis les tournants de plus en plus escarpés d'une montagne, est l'essence même de la poésie.
une incandescence |
Et pourtant j'aime le temps où je vis car c'est le temps où tout s'évanouit et que c'est peut-être, justement pour cela, le vrai temps du conte. Certes, je ne fais pas allusion ici à l'ère des tapis volants, des miroirs magiques, détruits par l'homme pour toujours dans l'acte même de les construire, mais à l'ère de la beauté en fuite, de la grâce et du mystère sur le point de disparaître, comme les apparitions et les arcanes du conte : tout ce à quoi certains hommes ne renonceront jamais, portés par une passion encore plus profonde quand cette présence semble vouée à la perte, à l'oubli. Tout ce vers quoi l'on part pour le retrouver, fût-ce au péril de sa propre vie, comme la rose de la Belle en plein hiver. Tout ce qui chaque fois se dissimule sous une carapace de plus en plus impénétrable, au fond de labyrinthes où s'exaspère l'effroi.
Maturité. Cet instant insondable qu'aucun homme n'atteindra avant l'heure, quand bien même tous les messagers du ciel descendraient lui prêter main-forte. Ainsi voit-on surgir dans les contes le cortège des apparitions, dont le verbe éloquent reste sans effet : le renard, la colombe, la vieille au fagot de brindilles. Tous tiennent pourtant le même discours, et répètent avec insistance le même avertissement. Il serait facile d'entrevoir, sous le pelage roux, les plumes et les haillons, l'éclair bleu et l'habit d'une Moire ...
Maturité : ni fulgurations ni voix. Mais un avènement inopiné, biologique voudrais-je dire : un point que doivent toucher ensemble tous nos sens, afin que la vérité se fasse nature.
Comme se réveiller un beau matin en sachant une langue nouvelle.
Et les signes, vus et revus, deviennent parole.
sans titre. VIII |
_ Cristina Campo, Les Impardonnables
Traduit de l'italien par F. de Martinoir, J.B Para et G. Macé
[Éditions Gallimard, L'Arpenteur]
dimanche 4 août 2024
Ressac contre sillage [le corps]
je te regarde comme une lectrice aspirée quelques notes de musique sont suspendues à mes pulsations mes yeux sont aimantés à une géométrie inédite c'est toi l'astrolabe et son infinité de dimensions je suis imprégnée de rythmes et de hauts concerts d'étoiles j'ondule sur le jeu raffiné de ton imagination tes mains soulignent l'aura mystérieux d'une colline tu ne me vois pas derrière ma bouche j'écris la vie sur ma poitrine je te regarde toujours affleurer le sol de la colline où la révolution est sidérale c'est là le pouls du temps je sens tu m'écoutes comme assailli par le fruit de mes mots désir et jus de liberté depuis la première parole autour de nous tout est liquide la musique a rejoint l'embouchure d'une plaine et quelque chose d'une baie bleue se distille il fait nuit l'eau s'endort sous la voûte de ton palais que faisons-nous de la profondeur des lacs, où gravons-nous l'écriture de nos pieds ailés ?
tout me sert de motif à ton attention
si la trace est une rare audace
je trempe mes lèvres dans les couleurs que tu as créées
vendredi 2 août 2024
La rosée sur la langue
Quand nous nous écoutons peau à peau, nous changeons.
— K.D, extrait de Diaphragmes
parterre de ciel |